Tu refermas tes bras autour des épaules de ton amie, caressant doucement ses cheveux roux avec ta main. Tu sentais ses larmes goutter sur ton cou, mouillant le col de ton vêtement. Tu la serrais fort contre toi, protectrice comme à ton habitude. Les secondes passèrent, s'étirant à l'infini. Son corps chaud lové entre tes bras. Tu aurais voulu que ce moment dure encore longtemps. Tu aimais les câlins et plus que tout, tu en avais besoin. Terriblement. Tes yeux étaient humides maintenant, profitant de l'étreinte pour s'autoriser quelques larmes. La voix d'Isle résonnait encore dans tes oreilles. Elle n'était pas la seule à avoir eu peur. Tu avais toi aussi cru que tu allais y passer. Toi ou l'un de tes frères. Ça te rendait malade.
Alors qu'elle se détachait de toi, tu reniflais brièvement et séchait tes yeux d'un revers de main. Elle fit de même. Les larmes avaient barbouillé son gracieux visage, creusé ses joues de fins sillons. "T'inquiètes pas Isle, c'est passé, tout vas bien. On est rentrés en un seul morceau tous les deux, c'est l'essentiel." Tu essaies de lui sourire, recalant ton flot d'émotion derrière ce masque factice. Tu n'es pas heureuse ni rassurée. Le traumatisme te tord encore les tripes. Dans le meilleur des mondes cette sensation se serait estompée bien vite comme les traces d'encres derrière les effaceurs. T'en aurais rêvé de ça. Rêvé de voir ta souffrance s'enfuir à toutes jambes. Une vague étreinte à nouveau, vivement suivit de l'échange d'un mouchoir. Vous en aviez autant besoin l'une que l'autre.

"Allons se manger quelques cookies avec Tom...enfin, le tien, pas mon frère" un léger rire s'échappa de tes lèvres et tu saisis la main de ton amie. Vous quittèrent la pièce, découvrant une cuisine vide de tout Tom. Il devait être sorti, tu l'imaginais mal quitter l'endroit sans un mot. Tu désignais l'assiette de cookies à Isle et saisissait les verres et le lait, calant la bouteille sous ton bras. À force de te refuser tout allez et retour inutiles tu étais devenue une pro au transportage de choses en tout genre. Le coinçage de stylos et petits carnets dans les poches arrières de ton jean ou dans ton t-shirt n'avait aucun secret pour toi.
Une fois dehors tu te trouvais une place aux côtés du garçon sur les marches de l'escalier. Te débarrassant du lait et des gobelets, tu attrapais un cookie et le fourrais dans ta bouche. « Ecrase-moi ça et mange quelques cookies plutôt. Il faut que tu te remplumes un peu. Pas vrai Jay ? » KEUFKEUFKEUF. L'image d'un Tom mi-homme mi-oiseau s'était irrémédiablement glissé dans ton esprit, provoquant chez toi un fou terrible fou rire. Avalant de travers, prenant garde à ne pas recracher ton biscuit, tu mis du temps à retrouver ton calme. "...Pardon." marmonnas-tu en essuyant tes yeux maintenant humides. "Oui tu devrais prendre un cookie, regarde comme ça m'a fait du bien ! T'as vu comme je suis remplumée maintenant ?" Tes paupières papillonnèrent un instant. Tu te sentis légère quelques secondes, oubliant la soirée de la veille et les petits corps des enfants se tordant dans l'herbe. Tu écartais de ton esprits les questions difficiles les "Combien enterrent l'un de leurs proches aujourd'hui ?".

"N'empêche, même s'ils sont un peu fourbes, c'est vachement bon ces conneries. Vous voulez du lait avec ?" Tes lèvres s'étirèrent en un sourire et tu te servis un verre. Tu attendais leur réponse. Les cookies trempés dans le liquide blanchâtre tenait plus du paradis qu'autre chose. Le genre de chose à te faire reprendre confiance en l'humanité. Tu attrapais un deuxième cookie et mordais dedans à pleine dents, avalant quelques secondes plus tard une gorgée de lait. Tu devais te retrouver aussi sexy qu'une bonne femme au concours de qui-mange-le-plus-gros-hamburger-en-moins-d'une-heure mais d'une certaine manière, tu t'en fichais. Ils n'étaient pas là pour ça. "Vous savez, ça me fait du bien de vous voir là, si vous n'étiez pas passé j'aurai sûrement passé le reste de la journée à me morfondre sur les événements d'hier et à imaginer les pires des scénarios." Ta gorge se serre sur la fin, mais tu tiens bon. Pas de larmes. Pas maintenant. Plus maintenant.