Les LeRoy ont toujours été natifs de Caswell, une famille autrefois renommée et respectée. L'un des ancêtres d'Elliot avait fait fortune dans l'automobile, malheureusement aux fils des générations, des descendants inconscients ivres de débauche et de luxure ont fait flamber l'héritage d'un claquement de doigt. Réduisant le nom LeRoy tant jalousé et admiré autrefois, raillé et méprisé à ce jour. Katherine LeRoy, la mère d'Elliot, n'a rien eu de cet héritage, mise à part le vent qu'il était monstrueusement colossale. Elle travaillait en tant que manager dans une boîte de décoration d'intérieur, elle gagnait très bien sa vie et pouvait faire vivre ses deux fils convenablement. Les deux garçons n'ont jamais eu l'occasion de rencontrer leur père respectif, car oui, bien qu'Ellie considérait Lewis comme vrai frère de sang, ils ne l'étaient qu'à moitié. Pour le père de Lewis, l'homme était quelqu'un d'influent à Caswell, il renia donc sa paternité car en plus d'avoir peur de perdre ses privilèges par ses frasques, il avait déjà une famille parfaite qu'il s’était créée, il n'avait par conséquent besoin d'entacher son nom pour un "bâtard". Quant à Elliot, Katherine avait sincèrement aimé son père, mais elle n'avoua jamais à ce dernier qu'elle portait son enfant. C'était un étranger de passage pour des vacances qu'elle ne revit jamais, de peur qu'elle le rejette à son tour.

Lewis et Elliot ont toujours eu une relation de dominant et de soumis, Lewis le contrôlait car c'était l'aîné, l'homme de la maison. Il se permettait de lui interdire des choses, de l'obliger à en faire certaines et de le punir à coup de poing, bien que les mots étaient ce qui le lacérait le plus souvent de sa part. Alors que Katherine avait toujours été une mère avenante et protectrice envers son petit dernier ( que tout le monde dans la petite ville devinait être celui qu'elle préférait ) Lewis lui, aimait rétablir les choses à sa façon, en jouant avec lui de manière vile.




Son enfance se passera de commentaire car mise à part son handicap qui faisait de lui un enfant " a part " il n'y a rien à redire sur cette période de sa vie. Je peux vous parler cependant de ce qui le différencie ? Eh bien Elliot est aveugle, il n'a jamais su et ne saura jamais à quoi ressemble son visage, ni celui de sa mère, de son frère… Le monde malgré qui lui soit invisible, lui reste bien palpable par sa cruauté, son injustice et son odeur nauséabonde. Il eut un avant-goût de cela en entrant au collège.

Lorsqu'on est différent, surtout dans une ville ou tout doit être conforme, propre et constant, ça se sait, on juge et soit on s'apitoie, soit on aide mais lui eu le droit au troisième cas… On martyrise. C'était facile de s'attaquer à lui déjà car il était aveugle, ce qui en faisait une proie très amusante à faire tourner en bourrique et en plus il était gay. Son homosexualité a déclenché cette haine profonde, lui-même a découvert son penchant à l'aube de ses treize ans, un garçon de la même classe que son frère s'était entiché de lui et de là des liens dépassant l'amitié finir par naître. C'était sa première et unique expérience amoureuse, ça se sut évidemment très vite et il paya sa différence de manière tellement inhumaine que je n'oserais l'évoquer ici, je peux juste vous dire que c'était terriblement humiliant, frustrant psychologiquement et qu'il porte de nombreuses séquelles physiques des "punitions" qu'on a eu l'audace de lui infliger gratuitement.

Lewis dans tout ça n'a jamais aidé son frère, tout le monde savait qu'il était bizuté, car tout ce sait à Caswell, évidemment. Et pour ne pas se faire lui-même taper dessus, il resta en retrait et se vengea sur le garçon de sa classe, celui qui avait osé tomber amoureux de son frère. Pas pour la fierté de la famille, il se fichait bien de venger l'honneur d'Ellie, c'était juste pour ne pas être une victime à son tour.

Sa mère s'inquiétait énormément des mauvais traitements qu'il pouvait recevoir et s'en prenait à son fils aîné… Une scène bien marquante me rappel l'un de ces moments de conflits.

Ils étaient tous les trois dans le salon, Elliot sur le canapé, le bras bandé et le visage couvert de bleu. Katherine avait les bras croisés sur sa poitrine, l'air courroucé elle fixait son aîné, elle avait les larmes aux yeux. Lewis, lui, était avachi sur un fauteuil en cuir bleu trônant face à la télé, il faisait abstraction du monde qui l'entourait et de toute cette agitation qu'il trouvait pour le moins, terriblement pénible.

— Regarde l'état de ton petit frère, et toi évidement tu ne dis, ni ne fais rien ! Tu restes là jucher comme un idiot, remue-toi ! Un jour ils finiront par me le tuer ! C'est ton sang, tu n'as qu'un frère, un seul, quand je ne serais plus là vous devrez veiller l'un sur l'autre. Elle tremblait tellement de rage qu'elle du se tenir les mains pour tenter de garder le contrôle, Lewis, regarde-moi au moins ! Nous ne sommes pas transparents ! Nom de Dieu, si le seigneur te voyait mon pauvre garçon…

Les traits durcis, il éteignit la télévision, tourna la tête en direction de sa mère et se leva lentement, mais d'une manière de prédateur. Ellie avait un vague souvenir de cette scène, il se souvenait de la voix dure et forte de son frère et bien qu'il ne pût pas voir, il arrivait à ressentir. C'est difficile à expliquer mais à cet instant-là, il sentait la peur de sa mère et presque immédiatement, ce sentiment d'animal craintif se répercuta sur lui.

— Si je ne dis rien mère adorée, dit-il sur un ton médisant. C'est parce que ton fils est une lavette et nous sommes frères à cause de tes coucheries ! C'est pas mon gosse, occupe-toi en ! Tu peux lui dire que t'es malade et que ce pauvre petit va finir le reste de ses jours avec moi. Et oui l'aveugle, la mère elle a le cancer et on n’a pas l'argent pour la guérir. Kath' compte pas sur moi pour veiller sur lui quand tu seras plus parmi nous.

Il avait entendu le bruit d'une gifle puissante, celle de sa mère contre la joue de son frère ( du moins il le supposait car ce dernier n'avait plus rien dit après ça ) La nouvelle de sa mère étant souffrante ne le surprit pas, mais qu'elle allait en mourir par contre… Elle n'a jamais voulu lui faire du mal et lui cachait sa maladie avait été facile, du moins elle le crut mais Elliot avait bien deviné que quelque chose clochait et ce, depuis un bon moment. On n’a pas besoin de voir pour comprendre, ressentir les choses, mais il faisait l'ignorant car il savait que ça la rassurait de savoir qu'il était innocent face à la laideur du monde.



Deux mois après ses seize ans Elliot perdit sa mère, emportée par la maladie. Je ne vous décrirais pas dans les détails à quel point il a été abattu par ce drame, vous le devinez bien. Par contre la suite de l'histoire mérite d'être révélée, commençons par l'héritage ! Les deux frères avaient respectivement eu la même somme et elle était pour le moins conséquente, du moins à leurs yeux, quelqu'un de dit riche aurait trouvé leur pactole pas vraiment attrayant, du moins pas au point de vouloir les dépouiller. Avec cet argent Lewis avait ouvert un petit bar, là où les gangs aimaient se retrouvait, ainsi que des femmes de joie et d'autres petites gens peu fréquentable. Elliot lui, avait dans l'optique de poursuivre ses études, en plus de ça, il avait reçu une bourse pour une grande école grâce à ses résultats scolaires excellents et ses compétences sportives ( dans la course à pied ) remarquable, malheureusement le destin choisi une autre voie pour le garçon. Son frère était un fan de poker et il lui arrivait pendant le travail de jouer avec des clients, mais un soir ça tourna mal. Lewis était complètement ivre et avait joué la maison de leur défunte mère ainsi qu'une grosse somme, il perdu tout et Elliot du vider son compte pour sortir son frère de la mouise et a donc renoncé à son rêve d'étudier dans une Fac prestigieuse, déjà car il devait travailler avec Lewis au bar, histoire de ne pas avoir d'autres frais en embauchant un salarié et il ne pouvait plus consacrer de temps à ses études. Il avait dû dilapider son argent pour trouver une masure vivable et même avec la bourse qu'il avait reçue, il n'aurait jamais pu suivre les achats scolaires et les à côté.

Le bar ferma six mois après que les deux frères se soient associés, des histoires malsaines ont fait chuter leur chiffre d'affaire et ils se retrouvèrent sans emploi. La nourriture commençait à manquer, les factures s'agglutinaient dans leur boîte aux lettres, et Lewis qui avait des penchants excessifs pour le jeu, s'acharner à les endetter. Un soir, l'aîné rentrait d'une fête alcoolisé, mais juste assez conscient pour pouvoir tenir une conversation normale et se remémorer tous ses dires le lendemain ( il était perpétuellement dans cet état, matin comme soir. Surtout depuis la mort de Katherine )

— Tu fou quoi ? Demanda impétueusement Lewis à son cadet qui lisait un livre en braille par terre ( car les seuls meubles qu'ils avaient dans le séjour étaient : deux chaises et une table de jardin et un meuble où été posée une télé qui ne fonctionnait plus )
— Je lis.
— Ça me fera toujours marrer de t'entendre dire ce genre de connerie.

Elliot ne releva pas, il ne voyait pas ce qu'il aurait pu rétorquer, puis s'il avait eu le culot de faire une réflexion il s'en serait sûrement pris une.

Lewis vint s'asseoir face à son frère de dix-huit ans à l'époque et le contempla de haut en bas, il avait pensé à ça depuis un certain moment, oui, mais il n'avait jamais partagé son idée avec son cadet. Il avait décidé de prendre cette mesure car ils étaient pris à la gorge, il n'y avait pas trente-six solutions, du moins pour son simple esprit c'était son seul exutoire.

— Faut qu'on parle frangin, il retira le livre des mains de son frère et continua de le fixer. J'ai encore joué, on n’a plus rien, keudal. On a trop de dette et vu que tu glandes rien j'ai trouvé une solution.

Elliot se contenu de commenter que lui aussi ne faisait pas grand-chose, mise à part les enterrés un peu plus chaque jour.

— Je connais une nana qui se fait pleins de fric en se prostituant, tu vas faire pareil et moi je veillerais à ce que ça se passe bien.

S'en suivi moult protestations, bagarres, insultes, mais quelques jours plus tard il était sur le trottoir, Lewis avait encore gagné. L'aîné gérait tout, les heures de travail, les clients, Elliot, il avait une totale emprise sur lui et personne n'avait le droit de contester son autorité au risque de représailles douloureuse.

Aujourd'hui cela fait un peu moins d'un an que les deux frères fonctionnent comme ça, ils arrivent à survivre péniblement, mais y'arrivent. Une phrase à citer avant d'en finir ?

— Toute façon tu vois rien, ça sera facile.

Lewis se trompait tellement. Le mal est partout, il ne suffit pas de fermer les yeux pour ne plus le voir